'Vidéo' Category

Poutchou Poutchou

January 21st, 2006 January 21st, 2006 by Jack Bauer
Posted in Télévision, Vidéo
3 Comments »

Elle est jeune, blonde, mignonne et sexy. Un poil plus énergique que la bombe d’Hiroshima, un micron plus bavarde que ma concierge, un chouïa moins attentive aux problèmes de ses semblables qu’un caillou, elle est toute entière dévouée à la cause du seigneur Il Palazzo, apprenti dictateur pontifiant et fondateur de l’organisation secrète Across, dont le but est de conquérir le monde, en commençant par la belle ville de F (Japon).

Elle, c’est Excel, héroïne d’Excel Saga, série animée japonaise hystérique, furieuse, barrée, parodique, hyper-référentielle et hilarante (pour qui tient le rythme). Excel, c’est très simple : elle ne la ferme jamais, n’écoute pas ce qu’on lui dit, traverse la vie en semant un bodel noir autour d’elle sans s’en soucier dans les rares cas où elle s’en rend compte. Elle est flanquée d’une jolie brune encore plus paumée, qui a une fâcheuse tendance à mourir toutes les cinq minutes.

Autour d’elle s’agite toute une collection de personnages hyper pas réalistes. Ses trois voisins chômeurs – glandeurs, dont l’un s’exprime à la manière d’un personnage de BD, à savoir à l’aide de texte apparaissant au-dessus de lui, deviendront employés municipaux et enfileront ainsi des costumes à super-pouvoirs avec lesquels ils s’efforceront de rétablir l’ordre. Leur chef est un grand type mystérieux dont la moustache ne tient pas très bien.

Occasionnellement, on croisera aussi des Poutchous. Les Poutchous sont de petites créatures extraterrestres très mignonnes dont l’intention est d’envahir notre planète. Hélas pour les humains, même ceux qui connaissent leurs plans ne peuvent rien contre eux : ils sont trop mignons. Le célèbre Majordome de l’espace en fera les frais.

Et puis, il y a Menchi. Menchi est une petite chienne blanche toute choupinette qui ressemble à un chat. Elle a le malheur d’appartenir à Exel, qui la transporte attachée sur sa tête et la surnomme « ragoût de secours ». Menchi accumule emmerdes, déconfitures et frustrations. C’est elle qui chante le générique de fin (en langage chien traduit en japonais), intitulé « Boléro de la tristesse – Alors, vous allez me manger ».

Mais ce n’est rien face à ce qu’endure Pedro, un ouvrier sud-américain exilé au Japon loin de sa femme et de son fils. D’abord, il meurt. C’est là que ses ennuis commencent vraiment. La Volonté Suprême de l’Univers (une espèce de galaxie avec des bras humains) se prend d’affection pour lui, mais ne fait qu’aggraver ses problèmes. Mort, Pedro souffrira mille tourments, jusqu’à ce que son histoire finisse par avoir un lien avec le reste.

Car pour découvrir et comprendre où va Excel Saga, il faut s’accrocher. D’abord conçue comme un laboratoire permettant de jouer avec tous les sous-genres et les codes de l’animation japonaise, la série raconte quand même une histoire, même si on a beaucoup de mal à en percevoir les contours pendant, mettons, vingt-deux épisodes. Pour une série qui n’en compte que vingt-six, vous reconnaitrez que ce n’est pas banal (surtout que l’histoire se conclut à l’épisode 25, tandis que le dernier est un pur cadeau aux fans et une démonstration ultime d’hystérie maîtrisée).

Excel Saga. 26 fois 22 minutes de bonheur sous acide, de folie cocaïnomaniaque, de critique sociale ilpalazzienne, de poutchous trop mignons et de chutes dans des trappes parce que foutrebleu, Excel, tu vas la fermer, oui ou merde ?!!

Excel Saga, c’est bien.

Comment j’ai découvert Samuel Barber

January 16th, 2006 January 16th, 2006 by Ed
Posted in Beaux Arts, Vidéo
1 Comment »

La musique en fond sonore, ça peut convenir aux salles d’attente et aux supermarchés mais ce n’est pas (encore) de mise dans les musées.

J’étais donc intriguée, en entrant dans une petite salle du Tate Modern, de me retrouver baignant dans une musique un peu austère. Un petit attroupement m’empêchait de bien voir ce qui était présenté dans la pénombre de la salle mais j’avais pu apercevoir le corps nu d’un jeune homme.

barber[1].jpgFoin de concupiscence, c’est la musique de Samuel Barber qui m’a incitée à rester. Au bout d’un moment, des visiteurs ayant poursuivi leur chemin, je me suis retrouvée face au jeune homme gracile qui se mouvait, nu, sur l’écran. Son corps se balançait, ondulait assez souplement en cadence. Son sexe battait, lui aussi, contre ses cuisses, son ventre mais pour le jeune homme, ça n’avait aucune importance, il ne ressentait aucune gêne puisque le public n’existait pas. Seul, il dansait au milieu de sa chambre, l’air absorbé et extatique. Son grand corps blanc et mince semblait s’offrir, entrer en communion spirituelle avec la musique qui nous était donnée à écouter et que nous écoutions dans le silence religieux de cette étonnante chapelle.

Brontosaurus.jpg

J’ai fini par me retrouver seule dans la salle, envoûtée par la musique, fascinée par cette danse, à peine distraite par le va-et-vient des rares visiteurs qui avaient tôt fait de tourner les talons face à ce spectacle insolite.

J’ai pris soudain conscience du spectacle que j’offrais moi aussi, seule à admirer ce jeune danseur nu. De visiteuse, spectatrice, j’étais devenue voyeuse et j’ai ressenti le besoin, littéralement, d’aller voir ailleurs. Mais avant de partir, il me fallait quand même savoir qui était le maître d’oeuvre de cette composition si intrigante et quelle était la musique sur laquelle le jeune homme semblait être en transe. Un panneau se trouvait à l’entrée de la salle mais j’avais été tellement hypnotisée que j’étais passée à côté sans le voir.

taylor-wood[1].gifUn peu gênée, j’ai consacré quelques instants à la lecture du panneau qui m’appris que l’artiste était une femme du nom de Sam Taylor-Wood et la musique une composition de Samuel Barber intitulée Adagio.

Un commentaire de l’artiste expliquait la création de Brontosaurus et replaçait l’oeuvre dans son contexte. On apprenait ainsi que le jeune homme avait été filmé alors qu’il dansait nu sur une musique techno-jungle assez rapide. Puis le film avait été ralenti jusqu’à donner une certaine grâce, élégance aux mouvements parfois désordonnés du danseur. Enfin, la musique originale avait été remplacée par cet adagio mélancolique, accentuant le caractère fragile du sujet livré à notre regard scrutateur et impudique.

J’avais donc bien senti le malaise qu’avait voulu nous faire ressentir l’artiste. Elle-même avait été frappée par l’utilisation de l’adagio pour cordes de Barber au cinéma où la musique avait été choisie pour illustrer tantôt l’héroïsme, tantôt la difformité. Sa composition, quant à elle, mettait en scène les nombreuses facettes de l’humain, à la fois beau, maladroit, pathétique et ridicule , faisant surgir des sentiments tout aussi divers et contradictoires.

J’ai finalement quitté la salle ce jour-là avec le sentiment d’avoir fait une vraie découverte : celle de deux artistes qui, à travers la conjonction de deux oeuvres, arrivent à imprimer une marque profonde.